Publié le 20 janvier 2020
Un billet d’humeur pour sourire de nos délires à l’ère de l’obsession alimentaire. Anna Décosterd est auteure du blog culinaire My Sweet Mouette et photographe culinaire autodidacte.

Nouvelle année, nouveaux marronniers… Sur Facebook, après la déferlante détox, revoilà «les meilleurs brunchs de l’année». Pfff… Je vous l’avoue, les brunchs, j’en ai ras la casquette. Non pas que je sois particulièrement attachée aux dîners de famille chez belle-maman, ni même au poulet rôti-frites d’après la messe qui a rythmé mon enfance. Je ne suis aucunement allergique au dimanche. C’est juste qu’avaler cette combinaison des «breakfast» et «lunch» anglo-saxons, c’est comment vous dire… trop me demander.

Lorsque le concept est apparu, j’ai adoré l’idée: un truc simple et sympa, à partager entre copains. Quelques croissants, du bon pain, des rondelles de saucisson, une salade composée. On proposait un café, voire un verre de vin. Je garde un souvenir ému des premiers brunchs du premier août, organisés dans les villages vaudois en l’honneur de la Fête Nationale, devenue (enfin) un jour férié. Je m’en rappelle très bien, ma fille avait 3 ans lors du premier et a pris la chose très au sérieux. Nous sommes partis «à la campagne», voir les vaches, la couverture qui pique les fesses sous le bras. On s’est installés dans l’herbe, on a fait le tour des stands. Sur place, toutes le monde avait répondu présent, on a goûté les pâtés, le boutefas et le jus de pomme maison. La file était trop longue, on n’a pas beaucoup mangé, mais on a bien rigolé. Oui mais voilà, c’était le début du siècle…et les débuts du brunch.

Aujourd’hui, le brunch ce n’est plus de l’impro. C’est un truc très sérieux. On étudie les propositions, on compare la créativité des chefs, on scrute la provenance des croissants. Il lui faut une belle vue, un beau salon, une ambiance cosy ou branchée, c’est selon. On recense les gloires montantes et les étoiles pâlissantes, on se refile les bonnes adresses sous le manteau. Partout, les buffets se succèdent: sucré, salé, chaud, froid… Personne pour rechigner devant le prix; alors que franchement, la plupart du temps, il faut y lâcher un gros sac de ducats. Devant tant de ferveur, je m’interroge. Qu’est donc devenu le brunch? Un symbole du «toujours plus»? Une nouvelle tradition, pour remplacer le rôti de grand-maman? Une obligation mondaine à laquelle se soustraire équivaudrait à programmer sa mort sociale? Et surtout, surtout chers amis, cette question: comment arriver à manger d’un coup autant de plats différents?

Je n’aime donc plus le brunch… Ce «trop plein de tout» épuise mon esprit au moins autant que mes papilles. Je lui préfère le petit-déjeuner, qui ouvre la journée à de joyeuses perspectives, n’alourdit pas mon estomac et n’embrume pas mon cerveau. Certes, il exige une discipline minimale: se lever suffisamment tôt. Mais quel bonheur! Avec l’odeur d’un bon café dans le nez, un croissant tout frais à portée de main et le soleil pour seul guide, je me sens prête à tout affronter. Même le déjeuner.

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