La violence a-t-elle un sexe ?

Publié le 8 décembre 2017
Phénomène humain complexe, la violence dépasse largement la problématique du genre, plaide Séverine Cesalli, psychothérapeute et vice-présidente de l’association «donna2». Elle met en garde contre les dangers d’une approche polarisante et simplificatrice. Sa réaction au débat actuel.

Journée internationale contre la violence faite aux femmes, affaire Weinstein… Des victimes, chaque jour plus nombreuses, osent s’exprimer et se sentent entendues. Enfin ! La violence contre les femmes n’est pas admissible. La violence tout court, à vrai dire. Pourquoi donc se focaliser sur la violence faite aux femmes ? La violence faite aux hommes est-elle rare au point de pouvoir être passée sous silence ? Cette focalisation sur la violence genrée ne renforce-t-elle pas un stéréotype nocif pour l’un comme pour l’autre genre : « Les hommes battent, les femmes sont battues » ?
Femme du XXIe siècle, solidaire des revendications émancipatoires et égalitaires des mouvements féministes, je refuse toutefois d’être identifiée à une victime de la société patriarcale, et je m’oppose au déni ingénu d’une violence d’origine féminine. Par ailleurs, vice-présidente d’une association défendant entre autres choses l’égalité des pères et des mères, j’observe que notre société est loin d’être uniformément patriarcale. En tant que psychiatre, enfin, je considère la violence comme étant d’origine multifactorielle et résultant la plupart du temps d’une dynamique relationnelle complexe et sexuellement neutre. Ma pratique de psychothérapeute d’enfants et d’adolescents et de leurs familles me conduit régulièrement à entendre des hommes (et garçons) victimes et des femmes (et filles) auteures.
Victimes masculines ?
Au sujet des hommes battus, la philosophe féministe Elizabeth Badinter a pu dire : « C’est un sujet tabou, mal élevé et politiquement très incorrect tout simplement parce que parler des hommes battus est ressenti comme une volonté de diminuer la critique qu’on pourrait adresser aux hommes qui battent. (...) Les risques, c’est d’être traitée, comme je l’ai été, de suppôt du patria...

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