Féminisme et classes sociales

Publié le 23 décembre 2022
Le véritable sujet du livre «Le Droit au sexe» n’est pas le sexe mais la classe sociale. Pour l’auteur, Amia Srinivasan, les féministes sont de deux sortes: celles qui appartiennent à la classe dominante et qui se comportent comme telle en usant des outils habituels de celle-ci, en ayant recours, par exemple, à la police et à la justice, et celles qui appartiennent aux classes dominées et qui luttent pour une transformation globale de la société. Le problème étant qu’aux Etats-Unis, les premières ont totalement évincé les secondes.

Philosophe née de parents indiens en 1984 à Bahreïn, Amia Srinivasan est titulaire de la chaire de théorie sociale et politique à l'université d'Oxford et son ouvrage qui a été traduit en 20 langues, se termine par quarante pages d’une bibliographie très dense et constituée principalement par des articles récents.
Pour elle, le sexe est quelque chose qui se situe clairement dans le cadre de la critique sociale et elle assume ouvertement être en guerre contre une partie des féministes. Moins par plaisir de la controverse que par souci de réinventer un militantisme pro femmes qui se dégagerait de ses côtés autoritaires.
Le consentement
En ce moment, il existe des sujets qui font plus mouche que d’autres. Le consentement sexuel par exemple. Pour appréhender cette question dans toute sa complexité et ses profondes ambivalences, l’autrice, tout en soulignant la nécessité d’aller au-delà du «oui et non», de l’acte voulu et du non désiré, interroge les relations tendues entre discrimination et préférence, pornographie et liberté, viol et injustice raciale, punition et responsabilité, plaisir et pouvoir, capitalisme et libération.
Comment se fait-il que nous en soyons arrivés à accorder un tel poids psychologique, culturel et juridique à la notion de consentement, s’interroge-t-elle. Joignez-vous à moi, continue-elle, pour rêver d’un sexe plus libre, pour avoir l’audace de refaire une critique politique du sexe, en prenant au sérieux le rapport complexe entre le sexe et la race, la classe, le handicap, la nationalité et la caste, en réfléchissant à ce qu’est devenu le sexe à l’ère d’internet, en interrogeant ce que cela signifie de faire appel au pouvoir de l’Etat capitaliste et carcéral pour répondre aux problèmes soulevés par le sexe.
Critiquant une bonne partie de la pensée ...

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