Plusieurs choses que vous ne saviez pas sur Wikipedia

Publié le 16 avril 2020
Tout d'abord que Wikipédia est aujourd'hui le huitième site le plus visité au monde et qu'il est l'une des sources les plus fiables. La version anglaise vient de dépasser les 6 millions d'articles et les 3,5 milliards de mots. Néanmoins, sa réputation ne change pas, explique le magazine américain Wired.

Il est difficile de trouver quelqu’un qui ignore Wikipédia, qui ne s’est jamais tourné vers l’encyclopédie en ligne pour faire une recherche, confirmer une date ou un nom. Mais après presque 20 ans d’existence, les gens se demandent encore comment n’importe qui peut écrire sur cette base de connaissances universelle. Aujourd’hui, Wikipédia (du hawaïen wikiwiki, qui signifie bientôt) est le huitième site le plus visité au monde et constitue une source de référence très sûre. Dans la version anglaise qui compte 6 millions d’articles depuis peu, on enregistre 1,8 changements par seconde. Wiki contient toutes (ou quasi) les connaissances humaines et est alimenté presque entièrement par des bénévoles.

Mais pourquoi les wikipédiens mettent-ils sur leurs épaules des millions d’heures de travail, pour mettre en ligne, par exemple, la vie et les miracles d’une chèvre commune? Et sans être payé? s’interroge Wired. La réponse est simple: parce qu’ils ne le vivent pas comme un travail. En 2018, Jimmy Wales, l’un des créateurs de l’encyclopédie en ligne, a déclaré au site Hacker Noon: «Que les gens travaillent gratuitement est un malentendu. Il est plus exact de dire qu’ils s’amusent gratuitement».

Bien que de nombreux professionnels, des médecins notamment, consultent Wikipédia, on doit reconnaître que tout n’est pas parfait dans ce système. Les problèmes que l’encyclopédie rencontre sont discutés sur des forums d’autocritique comme «Why Wikipedia is not so great» (Pourquoi Wikipédia n’est pas si génial). Un contributeur note que «de nombreux articles sont de mauvaise qualité». Une autre préoccupation est que «le consensus sur Wikipédia pourrait être une forme problématique de la production de connaissances». Un troisième note que «tout le monde peut entrer dans une page et la modifier».

Mais il est à relever qu’en près de 20 ans, plus les gens participent à l’élaboration d’un article, plus la qualité du contenu est élevée, surtout lorsque des personnes ayant des visions différentes y participent.

Il est à noter aussi l’importante disproportion entre les hommes et les femmes dans les contributions. Les rédacteurs bénévoles sont à 90% des hommes. D’autre part, des femmes et des hommes font état de harcèlements fréquents de la part de leurs collègues contributeurs: agressions verbales, diffusion de données personnelles, intrusion informatique, menaces de mort. L’organisation qui gère le site a reconnu à plusieurs reprises le problème et a pris des mesures pour le résoudre.

A part cela, Wikipédia se distingue de manière positive. C’est le seul site à but non lucratif qui figure parmi les dix premiers du monde, et l’un des rares à figurer dans le top 100. Il n’est pas couvert de publicités, il ne s’immisce pas dans la vie privée des personnes et n’est pas un vivier de trolls néo-nazis. Comme Instagram, Twitter et Facebook, il publie du contenu généré par les utilisateurs, mais son produit est dépersonnalisé, collaboratif et au profit de la communauté. Plus qu’une encyclopédie, Wikipédia est devenue une communauté, une grande et précieuse encyclopédie collective en ligne. 

Elle s’avère même comparable à l’Encyclopædia Britannica. En 2005, le magazine Nature a publié la première étude comparative importante entre les deux sources. Il est apparu que, du moins pour les articles scientifiques, les deux bases étaient presque comparables: l’Encyclopædia Britannica faisait une moyenne de 3 erreurs mineures par entrée, tandis que Wikipédia révélait une moyenne de 4.

D’ailleurs lorsque nous questionnons Siri d’Apple ou Alexa d’Amazon – les assistants vocaux les plus connus que de nombreux utilisateurs interpellent plusieurs fois par jour – c’est Wikipedia qui leur apporte souvent la réponse. Lorsque vous recherchez sur Google une personne ou un lieu célèbre, c’est presque toujours Wikipédia qui fournit le panneau latéral affiché à côté des résultats de la recherche.

La prochaine étape ambitieuse vers la réalisation du rêve séculaire de créer un «cerveau mondial» est appelée Wikidata. Le système est encore sujet à des erreurs: Siri avait confondu l’hymne national bulgare avec la chanson accrocheuse d’il y a quelques étés, “Despacito”. A ce stade, une règle est claire: ne jamais faire confiance aveuglément à ce qui se trouve dans Wikipédia, mais cela vaut pour toute source d’informations. 


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