Publié le 2 décembre 2019
Chaque semaine, un billet d’humeur pour sourire de nos délires à l’ère de l’obsession alimentaire. Anna Décosterd est auteure du blog culinaire My Sweet Mouette et photographe culinaire autodidacte.

Au bon vieux temps

© Anna Décosterd

Mon ami Facebook m’informe ce matin qu’il y a 200 ans, tous les légumes étaient bio. Quelle nouvelle extraordinaire. Commentaire d’un internaute nostalgique: si seulement on pouvait revenir à l’époque…

Je fais un rapide calcul (avec mon iPhone, c’est plus sûr). Il y a 200 ans, nous étions en l’an de grâce 1819.

Que dégustait-on en Suisse en ce temps-là?

A nouveau, petite recherche (avec le même iPhone) et voici un petit aperçu du bon bio-temps: «L’éruption du volcan indonésien Tambora sur l’île de Sumbawa le 10 avril 1815 provoque une crise climatique mondiale. Les cendres volcaniques dispersées dans l’atmosphère se répartissent au-dessus de la surface terrestre et créent un voile diaphane empêchant le réchauffement solaire, ce qui provoque une baisse durable et sensible des températures. La dernière grande famine touche la Suisse de 1816 à 1817. Selon l’historien Daniel Krämer, en 1816, il neige pratiquement chaque semaine durant tout l’été, et ce jusqu’en basse altitude. Les récoltes de céréales, de raisin et de pommes de terre sont impossibles. Les plus pauvres sont parfois contraints à manger de l’herbe et des villages entiers sont abandonnés, leurs habitants ayant choisi l’exil, plutôt que la disette».

Si jamais vous tombez sur une machine à remonter le temps, je vous souhaite bon voyage.

 

Tout baigne dans l’huile

© Anna Décosterd

Ceux qui ne se sont pas endormis au fond du canapé devant leur télé savent que l’alternative végane au steak haché arrive, sous forme d’une masse à base de pois cassés, colorée au jus de betterave, enrichie en additifs secrets, fabriquée par une imprimante 3D et assaisonnée à l’huile de palme pour le goût.

Ah? Je vous vois dresser vos petites oreilles? L’huile de palme n’est-elle pas cette incarnation du diable en personne? Ne devait-on pas interdire le Nutella il y a quelque temps, ou du moins informer les enfants de la folie meurtrière qui a saisi leurs parents, le jour où ils ont cédé à la tentation de leur refiler un pot de l’horrible pâte à tartiner, prête à ruiner leur santé? Si si… C’est bien la même… Mais je crains qu’il ne soit plus facile d’arracher une tartine des mains d’un enfant innocent qu’un hamburger juteux de celle des millenials vieillissants.

Heureusement, tout n’est pas perdu. Dans un article paru dans Le Matin du 20 novembre 2019, le laboratoire des systèmes écologiques (ECOS) de l’EPFL nous informe que «l’huile de palme consommée avec modération n’est pas mauvaise en soi pour la santé et qu’elle a aussi une valeur économique pour des centaines de petits exploitants». (Sans blague. N’oubliez pas: même si vous foutez en l’air votre microbiote, vous pouvez toujours vous servir de votre autre cerveau et réfléchir par vous-mêmes). «C’est vraiment le bilan carbone et la perte de biodiversité qui posent problème».

Concernant le bilan carbone, soyons rassurés, au bout de 30 ans, on observe que «sur deux cycles de culture du palmier à huile, le niveau de carbone stocké dans l’écosystème reste ainsi inchangé par rapport au niveau qu’il avait avant la conversion du pâturage en champ de palmiers».

Si je comprends bien, toutes choses étant égales par ailleurs, on peut très bien se faire un hamburger (pourvu qu’il soit végane) suivi d’une pizza au nutella, c’est ça? Quel festin! J’en salive déjà.


Retrouvez photos et chroniques food sur le blog d’Anna et sur son compte Instagram

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