Black Friday versus gratuité

Publié le 23 novembre 2018

Selon le politique Paul Auriès, la gratuité pourrait enrayer cette constante et déplorable transformation qu’est la marchandisation. – © Logo par Ervin Bolat from the Noun Project

En ce jour de Black Friday, nous proposons un concentré de l’article «Eloge de la gratuité» paru dans «Le Monde diplomatique» de novembre. Une manière de repenser l’une des grandes questions de notre temps: la marchandisation.

«Le capitalisme, dont la vocation consiste à transformer le monde en marchandises, ne peut poursuivre ce processus sans menacer l’humanité d’un effondrement à la fois financier, social, politique et écologique», nous dit le politologue et directeur de l’Observatoire international de la gratuité Paul Auriès dans son article «Eloge de la gratuité».

Selon lui, la gratuité pourrait enrayer cette constante et déplorable transformation, car elle propulserait la société au-delà des questions de monétarisation, d’utilitarisme, d’économisme et permettrait à tout un chacun de se projeter au-delà des logiques de besoin et de rareté. Elle doit pourtant s’accompagner aussi de règles.

Premièrement, la gratuité ne peut pas se limiter à quelques services vitaux de la vie. Elle doit être pensée dans une diversité de domaines: «L’enjeu est bien de multiplier des îlots de gratuité dans l’espoir qu’ils forment demain des archipels et après-demain des continents» dit-il.

Ensuite, elle doit s’accompagner d’une réflexion plus globale. Prenant l’exemple de l’eau, Paul Auriès invite les collectivités à construire des réseaux de distribution plus petits pour éviter le gaspillage ou encore à repenser son cycle de vie afin qu’elle ne soit pas utilisée qu’une seule fois. La gratuité devrait donc également s’accompagner de la responsabilisation des citoyen-es (et des dirigeant-es politique) en matière de ressources, puisque même si elles sont gratuites, elles ne sont pas inépuisables.

Enfin, la gratuité provoque un changement des habitudes et doit donc ne jamais être pensée seule. Par exemple, la gratuité des transports publics (expérimentée dans plusieurs villes) ne peut se résumer à la suppression des billets ou des abonnements. «En île de France, (…) la gratuité [des transports publics] ne poserait pas un problème de financement, mais un risque de saturation du réseau (…)», écrit-il. C’est donc tout un système ou tout un réseau qui doit évoluer pour donner la possibilité de mettre en place les infrastructures nécessaires à cette gratuité.

Pour finir, le politologue conclut:

«Émancipatrice, la gratuité constitue un hymne au « plus à jouir ». On peut formuler mille reproches à la société de consommation; elle parvient toutefois à séduire en invitant à consommer toujours plus. Rompre avec cette « jouissance de l’avoir » implique de lui en opposer une autre: celle de l’être.»


L’article original de Le Monde diplomatique: «Eloge de la gratuité»

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