Morand à tire d’Aile
Depuis des décennies, son histoire alimente la chronique et pas seulement veveysanne. Je veux parler du fameux château de l’Aile, à l’angle de la place du Marché, en bordure de quai. Longtemps délaissé, menaçant ruine, voilà que sa restauration, grâce à un homme de goût, miraculeusement s’achève.
Avec ses pignons néo-gothiques, il fait irrésistiblement penser à l’un de ces châteaux de fantaisie chers aux princes de Bavière. Et l’on ne serait pas davantage surpris de le voir figurer dans le roman de Céline, D’un château l’autre, relatant l’exode vers le néant des derniers collaborateurs de Vichy. Car le château de l’Aile, comme on le sait, servit lui aussi de refuge à l’un d’eux, l’écrivain Paul Morand. Admirateur du maréchal Pétain et son représentant à Berne, il jugea plus prudent à la Libération de s’établir en Suisse; il y resta jusqu’à sa mort en 1976.
S’il y fut d’abord contraint, c’est par choix ensuite qu’il y demeura, se partageant entre le château de l’Aile, Lisbonne et son appartement parisien. Entre-temps, le proscrit est redevenu un auteur à la mode. Notamment grâce aux «Hussards», ces jeunes écrivains que Morand va prendre sous sa protection – j’allais écrire: sous son aile. Les Nimier, Laurent, Déon, qui, rejetant l’engagement sartrien, se revendiquent romanciers du bonheur. Toujours dans l’intervalle, Morand, avec l’assentiment de de Gaulle, est entré à l’Académie. Juste reconnaissance pour l’immense écrivain qu’il est.
Bien sûr, il y a la tache impardonnable de l’antisémitisme, particulièrement virulent dans ses lettres...
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