Édition du 21 avril 2023

La Suisse manipulée par l’UBS

Quand sau­ra-t-on comment le Conseil fé­dé­ral en est ar­ri­vé à l’is­sue pé­rilleuse et coû­teuse du dé­sastre de Cré­dit suisse? Ce n’est pas de­main la veille. Le Par­le­ment traîne les pieds, peu pres­sé de dé­cou­vrir grâce à une com­mis­sion d’en­quête les cou­lisses de l’opé­ra­tion. Et moins pres­sé en­core de mettre en place des garde-fous pour évi­ter une nou­velle ca­tastrophe avec l’UBS. Un vieux re­nard de la branche sou­lève un coin du voile.

Joe Acker­mann a pré­si­dé le Crédit suisse (CS) dans les an­nées 90. Puis il est allé à la Deutsche Bank dont il est de­ve­nu le pre­mier pré­sident étran­ger. Après un pas­sage dans le do­maine des assurances, il se dit au­jourd’­hui éco­no­miste in­dé­pen­dant. Son en­tre­tien avec Eric Gu­jer de la NZZ, dans l’émis­sion Stand­punkte, vaut le dé­tour. Il y ex­plique en long et en large qu’à par­tir d’un pe­tit pays, l’am­bi­tion in­ter­na­tio­nale dé­me­su­rée, dans les mou­vances in­son­dables et chan­geantes du «sha­dow banking» aux Etats-Unis, s’avère fort ris­quée. Hier comme aujourd’hui… et comme demain. Il rap­pelle sur­tout que l’UBS son­geait déjà à mettre la main sur le CS au moins de­puis 1998. C’é­tait pour elle un but stra­té­gique. At­teint main­te­nant, l’ayant reçu le 19 mars 2023 «en ca­deau» – c’est le mot uti­li­sé – du Conseil fé­dé­ral. Ce­lui-ci prêt par ailleurs à don­ner d’énormes ga­ran­ties à l’opé­ra­tion (209 mil­liards). Etait-ce la seule so­lu­tion pos­sible, comme le ra­bâchent les dé­pu­tés «chauf­fés» par l’UBS? Joe Acker­mann n’en croit rien. D’autres scé­narios lui pa­rais­saient envisageables. D’au­tant plus que de­puis un an, il mi­jo­tait avec quelques amis un plan de sau­ve­tage pour le CS qu’il voyait déjà ex­posé aux pires dan­gers. Avec l’in­jec­tion de ca­pi­taux pri­vés et sur­tout un dé­mem­bre­ment: concen­tra­tion sur le mar­ché suisse et ces­sion du sec­teur d’in­ves­tis­se­ments à l’étran­ger. Lire la suite…